16 février 2009 1 16 /02 /février /2009 18:00
Le soleil maintenant allonge son parcours;
L'aube plus tôt sourit aux bois impénétrables;
Mais l'air est toujours vif, l'autan rugit toujours
Parmi les rameaux nus et glacés des érables.

L'avalanche sans fin croule du ciel blafard;
Nos toits tremblent au choc incessant des tempêtes.
Cependant à travers bise, neige, brouillard,
Nous formons de nos jours une chaîne de fêtes.

Et tous les rudes sports d'hiver battent leur plein
Au milieu de clameurs follement triomphales;
Sur des flots dont le gel fit un cirque opalin
Les grands trotteurs fumants distancent les rafales.

Sur le ring ou l'étang par le vent balayé
Le gai patineur file ou tourne à perdre haleine.
Le sourire à la lèvre et la raquette au pied,
Des couples d'amoureux cheminent dans la plaine.

Par un souffle inconnu chacun est emporté.
Dans tous les yeux le feu du plaisir étincelle;
Et dans le bourg naissant comme dans la cité
Le bruyant Carnaval agite sa crécelle.

Les hôtels sont bondés de lointains visiteurs.
Maint pierrot dans la rue étale sa grimace.
La nuit, torches aux poings, les fougueux raquetteurs
S'élancent à l'assaut des grands palais de glace.

A d'émouvants tournois la multitude accourt.
Tout le peuple s'ébat, tout le peuple festoie,
Car, puisque Février est le mois le plus court,
Il voudrait s'y griser de la plus longue joie.

(William Chapman)

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15 février 2009 7 15 /02 /février /2009 07:00
Aux pans du ciel l'hiver drape un nouveau décor;
Au firmament l'azur de tons roses s'allume;
Sur nos trottoirs un vent plus doux enfle la plume
Des petits moineaux gris qu'on y retrouve encor.

Maint coup sec retentit dans la forêt qui dort;
Et, dans les ravins creux qui s'emplissent de brume,
Aux franges du brouillard malsain qui nous enrhume
L'Orient plus vermeil met une épingle d'or.

Folâtre, et secouant sa clochette argentine,
Le bruyant Carnaval fait sonner sa bottine
Sur le plancher rustique ou le tapis soyeux;

Le spleen chassé s'en va chercher d'autres victimes;
La gaîté vient s'asseoir à nos cercles intimes...
C'est le mois le plus court : passons-le plus joyeux.

(Louis-Honoré Fréchette - Oiseaux de neige)

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24 janvier 2009 6 24 /01 /janvier /2009 14:27
Le ciel pleure ses larmes blanches
Sur les jours roses trépassés;
Et les amours nus et gercés
Avec leurs ailerons cassés
Se sauvent, frileux, sous les branches.

Ils sont finis les soirs tombants,
Rêvés au bord des cascatelles.
Les Angéliques, où sont-elles !
Et leurs âmes de bagatelles,
Et leurs cœurs noués de rubans ?...

Le vent dépouille les bocages,
Les bocages où les amants
Sans trêve enroulaient leurs serments
Aux langoureux roucoulements
Des tourterelles dans les cages.

Les tourterelles ne sont plus,
Ni les flûtes, ni les violes
Qui soupiraient sous les corolles
Des sons plus doux que des paroles.
Le long des soirs irrésolus.

Cette chanson - là-bas - écoute,
Cette chanson au fond du bois...
C'est l'adieu du dernier hautbois,
C'est comme si tout l'autrefois
Tombait dans l'âme goutte à goutte.

Satins changeants, cheveux poudrés,
Mousselines et mandolines,
O Mirandas ! O Roselines !
Sous les étoiles cristallines,
Ô Songe des soirs bleu-cendrés !

Comme le vent brutal heurte en passant les portes !
Toutes, - va ! toutes les bergères sont bien mortes.

Morte la galante folie,
Morte la Belle-au-bois-jolie,
Mortes les fleurs aux chers parfums !

Et toi, sœur rêveuse et pâlie,
Monte, monte, ô Mélancolie,
Lune des ciels roses défunts.

(Albert Samain - Au jardin de l'infante)

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22 janvier 2009 4 22 /01 /janvier /2009 16:30
Il fait froid. Les blizzards soufflent, et nul rayon
Ne dore des forêts les blancheurs infinies;
Mais Noël sur nos seuils laissa comme un sillon
De clartés, de parfums, de paix et d'harmonies.

Et sur l'épais verglas des chemins boulineux,
Sur les trottoirs glissants et clairs comme l'agate,
Dans les logis obscurs, sous les toits lumineux,
L'allégresse loquace et tapageuse éclate.

En vain la neige à flots tombe des cieux brouillés,
En vain le grand réseau polaire nous enlace,
En vain le fouet du vent nous flagelle la face,
Nos cœurs ont la chaleur des bords ensoleillés.

Nos cœurs français n'ont rien des froideurs de la bise
Qui tord l'arbre souffrant et mort presque à moitié,
Et nous nous enivrons de la senteur exquise
Qu'épanche sur nos fronts l'arbre de l'Amitié.

Ce vif rayonnement de joie en tous sens brille
Et glisse jusqu'au gîte isolé du colon.
Aux tables des fricots le sel gaulois pétille,
Et tout un monde gigue au son du violon.

Les somptueux salons sont ruisselants de flammes,
Et sous le flamboiement des lustres de cristal,
Comme un écho divin, la musique du bal
Emporte en ses replis prestigieux les âmes.

Dans tout cercle du soir plus vive est la gaîté,
Pendant que sur les toits sanglote la rafale,
Ou qu'au ciel éclairci l'aurore boréale
Déroule les splendeurs de son voile enchanté.

(William Chapman)

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20 janvier 2009 2 20 /01 /janvier /2009 07:00
La grande plaine est blanche, immobile et sans voix.
Pas un bruit, pas un son; toute vie est éteinte.
Mais on entend parfois, comme une morne plainte,
Quelque chien sans abri qui hurle au coin d'un bois.

Plus de chansons dans l'air, sous nos pieds plus de chaumes.
L'hiver s'est abattu sur toute floraison;
Des arbres dépouillés dressent à l'horizon
Leurs squelettes blanchis ainsi que des fantômes.

La lune est large et pâle et semble se hâter.
On dirait qu'elle a froid dans le grand ciel austère.
De son morne regard elle parcourt la terre,
Et, voyant tout désert, s'empresse à nous quitter.

Et froids tombent sur nous les rayons qu'elle darde,
Fantastiques lueurs qu'elle s'en va semant;
Et la neige s'éclaire au loin, sinistrement,
Aux étranges reflets de la clarté blafarde.

Oh ! la terrible nuit pour les petits oiseaux !
Un vent glacé frissonne et court par les allées;
Eux, n'ayant plus l'asile ombragé des berceaux,
Ne peuvent pas dormir sur leurs pattes gelées.

Dans les grands arbres nus que couvre le verglas
Ils sont là, tout tremblants, sans rien qui les protège;
De leur œil inquiet ils regardent la neige,
Attendant jusqu'au jour la nuit qui ne vient pas.

(Guy de Maupassant)

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18 janvier 2009 7 18 /01 /janvier /2009 07:00
Ô le clair matin, la belle gelée !
Un soleil d’argent sur la plaine blanche
Verse une clarté frileuse et voilée :
On sonne la messe à toute volée :
Ô la bonne bise, ô le beau dimanche !

Sur les arbres morts aux ramures nues
En fins diamants resplendit le givre.
L’azur froid scintille à travers les nues,
Voilà mes gaîtés soudain revenues
Mon sang se réveille et je me sens vivre.

Adieu les couchants tout rayés de pluie,
Et les pleurs brouillés des mornes aurores
Les grands horizons brillent, et j’oublie
Les soirs gris trempés de mélancolie,
Sur le sol durci des routes sonores.

Allons respirer l’air de la prairie.
Sous les glaçons bleus chantent les fontaines;
C’est de purs cristaux que l’herbe est fleurie;
Mon cœur allégé vibre et se marie
Aux frais carillons des cloches lointaines.

(Charles Grandmougin)

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15 janvier 2009 4 15 /01 /janvier /2009 07:00
La tempête a cessé. L'éther vif et limpide
A jeté sur le fleuve un tapis d'argent clair,
Où l'ardent patineur au jarret intrépide
Glisse, un reflet de flamme à son soulier de fer.

La promeneuse, loin de son boudoir trépide,
Bravant sous les peaux d'ours les morsures de l'air,
Au son des grelots d'or de son cheval rapide,
À nos yeux éblouis passe comme un éclair.

Et puis, pendant les nuits froidement idéales,
Quand, au ciel, des milliers d'aurores boréales
Battent de l'aile ainsi que d'étranges oiseaux,

Dans les salons ambrés, nouveaux temples d'idoles,
Aux accords de l'orchestre, au feu des girandoles,
Le quadrille joyeux déroule ses réseaux !

(Louis-Honoré Fréchette - Oiseaux de neige)

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13 janvier 2009 2 13 /01 /janvier /2009 17:01
Par les matins d'hiver quand je lisais tes lettres
des roses de juillet fleurissaient aux fenêtres de mon rêve.
Bravant le givre, le verglas
les averses le vent du nord sonneur de glas
Je murmurais tes mots en suivant les ruelles tortueuses.
Soudain les rafales cruelles s'apaisaient,
le soleil inondait les maisons.
Je m'avançais sous de divines frondaisons
et je voyais sourire au fond du paysage
La grâce et la candeur de ton jeune visage.

(Tristan Derème)

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12 janvier 2009 1 12 /01 /janvier /2009 19:33
Au dedans, le silence et la paix sont profonds;
De froides pesanteurs descendent des plafonds,
Et, miroirs blanchissants, des parois colossales
Cernent de marbre nu l'isolement des salles.
De loin en loin, et dans les dalles enchâssé,
Un bassin de porphyre au rebord verglacé
Courbe sa profondeur polie, où l'onde gèle;
Le froid durcissement a poussé la margelle,
Et le porphyre en plus d'un endroit est fendu;
Un jet d'eau qui montait n'est point redescendu,
Roseau de diamant dont la cime évasée
Suspend une immobile ombelle de rosée.
Dans la vasque, pourtant, des fleurs, givre à demi,
Semblent les rêves frais du cristal endormi
Et sèment d'orbes blancs sa lucide surface,
Lotus de neige éclos sur un étang de glace,
Lys étranges, dans l'âme éveillant l'idéal
D'on ne sait quel printemps farouche et boréal.

(Catulle Mendès - Contes épiques)

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10 janvier 2009 6 10 /01 /janvier /2009 10:49
Je te salue, ô Reine immaculée et fine,
Souveraine que vêt un long manteau d'hermine !

Tu t'es vue à ma vitre, et ma vitre, en hommage,
A retenu captif ton radieux visage !

O Reine de blancheur, si fragile et si douce,
Le sol noir sous tes pas fleurit de blanche mousse !

Le Vent porte ta traîne et balance tes voiles,
La Nuit pose à ton front sa couronne d'étoiles !

Et l'arbre, qui n'a plus de sève ni de force,
Frémit quand tes bras clairs étreignent son écorce !

Si le petit enfant t'adore, ô pure Dame,
C'est qu'il peut comparer ta candeur à son âme !

Et pour te caresser, rieur, ses deux mains frêles
Ont la légèreté de deux petites ailes !

Tu marches sur les toits, secrète, à l'heure brune,
Et tu reçois le grand baiser bleu de la lune !...

En ce jour où tu vas en robe lumineuse,   
Je te salue, ô Neige humble et silencieuse !

(Albert Lozeau)

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