C'est le pauvre bonhomme de paille
Du cerisier
Le pauvre bonhomme aux bras d'osier
Dont tous les moineaux francs se raillent
A s'égosiller.
Sans haut-de-chausses et sans chemise
En son manteau de paysan troué,
Il grelotte sous la bise
Et les moineaux roués
Mangent son cœur saignant de cerise.
Le vent siffle en son corps déchiqueté,
Le vent siffle un ancien lied d'Allemagne
Comme en sifflent aux soirs d'été
Les gars aux moustaches à leurs compagnes
Sous les futaies.
Alors pour chasser les moineaux aux granges,
Les moineaux qui font saigner son cœur d'amour
Il lève ses bras maigres d'un geste fou
Et renverse sa tête aux cheveux de chanvre
D'où tombe son vieux chapeau de feutre mou.
Et le soir Marion la brune
Qui attend en vain sous le cerisier
Son amoureux qu'elle importune,
A vu se coiffer d'une corne de lune
Ce galant de paille aux bras d'osier.
(Tristan Klingsor)